Descartes joue son joker

A la vue de cette introduction riche en feveu sur la langue faisant partie du Discours de la Méthode, on pourrait penser que les écrivains de ce temps révolu se gausseraient de la pauvreté de notre mode d'expression actuel, si d'aventure H.G. Wells mettait ses plans à exécution. Et pourtant...
Le français tel qu'on le connaît aujourd'hui est né à peu près au 17e siècle. Ayant connu une longue évolution depuis Les serments de Strasbourg (842), le français n'était qu'une langue réservée à l'élite, à la Cour et aux aristocrates. Malgré l'édit de Villers-Cotterêts sous le règne de François 1er qui désignait le français comme langue administrative officielle, en lieu et place du latin, peu d'efforts étaient faits pour répandre la bonne parole dans un royaume dominé par le patois et les bouses de boeufs.
Moins de 1% de la population pratiquait alors le français. Contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, celui-ci se voulait pur, constitué de phrases courtes et d'un nombre de mots limité. Les écrivains adoptèrent la langue de la distinction et du bon goût car s'exprimer relevait de l'art, de l'élégance et de l'harmonie. La France rayonnait alors en Europe, culturellement et intellectuellement. La francophonie prenait son essort, avec des figures de proue dont la liste mnémotechnique est encore enseignée aujourd'hui :
Une Corneille perchée sur la Racine de La Bruyère
boit l'eau de La Fontaine Molière.
La prononciation différait cependant. On peut noter par exemple l'abandon de la lettre "s" du pluriel lors de la prononciation, qui subsiste toujours aujourd'hui en se faisant discret. Les "oi" étaient prononcés "wé" (François = Franswé), certains "é" ignorés, quelques consonnes de fin de mot oubliées.

On peut lire dans L'Honnête Homme ou l'art de plaire à la Cour :
M. de Vaugelas s'était appliqué dans ses Remarques à nettoyer la Langue des ordures qu'elle avait contractées ou dans la bouche du peuple, ou dans la foule du palais, et dans les impuretés de la chicane, ou par le mauvais usage des Courtisans ignorants, ou par l'abus de ceux qui disent bien dans les chaires ce qu'il faut, mais autrement qu'il ne faut.
Le souci de préserver une langue pure, loin des emprunts aux dialectes frontaliers, était réel. Etaient-ils en train d'en faire une langue morte et figée comme le latin ? Qui voulait donc assassiner la langue vivante ? Les grammairiens étaient persuadés d'être arrivés à la perfection. L'Académie française, fondée en 1635 par Richelieu devait superviser la pureté du français avec la publication de son dictionnaire. Et pourtant, l'analphabétisme se situait à cette époque autour de 99 % en France. Comme quoi, on a encore de la marge avec seulement 2.6 millions de skyblogs.
13 août 2005 à 01:07
La vie n’est qu’un éternel recommencement …
Arrivé à 99% de skyblog sur le net, on pourra refaire le ménage.
13 août 2005 à 02:18
Orson Welles ou H.G. Wells ?
13 août 2005 à 03:29
Nanu> dew se sera déjà suicidé je pense. ^_^
(sans lui vouloir le moindre malheur bien sûr)
13 août 2005 à 05:37
Alain Decaux il est pwned là!
13 août 2005 à 10:51
nicky > H.G. Wells, confondationnage tardif, merci.
13 août 2005 à 14:07
le souci de préserver une langue pure a fait énormément de tort… et pourtant, ce qui est impressionnant dans les serments de Strasbourg, c’est que finalement, l’allemand de 842 est plus compréhensible que le français
23 août 2005 à 17:27
Attention à bien distinguer les S des F anciens (comme sur le fac simile). Observe la petite barre horizontale attentivement : elle traverse la barre verticale du F, alors que pour le S elle est absente ou bien présente uniquement du côté gauche.
Et – shazam! – plus de feveu fur la langue !
23 août 2005 à 19:04
On va dire que j’étais au courant hein mais que j’ai fait exprès, sinon c’est moins drôle :)